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Dans l’ombre d’Arsène : quand Lupin sort de son Leterrier…

C’est un projet longuement teasé, souvent avec mystère; Omar Sy, Arsène Lupin, Louis Leterrier dans une même série Netflix. Pourquoi pas, après tout ? La série produite par Gaumont et Netflix est sortie le vendredi 08 janvier sur la plateforme. Victor en ressort avec l’amère impression de s’être fait voler son temps, aveuglé par l’élégance son comédien principal.

Ce n’est plus un secret pour personne, la pop-culture aspire maintenant à revisiter les figures légendaires d’autrefois. Aux États-Unis, ce phénomène est devenu presque une norme. L’exemple le plus évocateur : Les Derniers Jedi, huitième volet de la licence Star Wars, qui osait (avec brio, pour prendre une position là-dessus…) dire que les fondations du passé pouvaient être brûlées pour créer de nouvelles figures légendaires dans un mythe. Dans le cadre des séries, ces réappropriations (sans pour autant correspondre à du révisionnisme) furent légion grâce à l’accumulation de reboot pour se poser une question : quel héritage ces séries peuvent-elles laisser à notre époque ? Une époque résolument tournée vers des questions sociales. En France, rares sont les séries et/ou films qui vont dans le sens de cette démarche. À vrai dire, plutôt que d’aller vers une direction évolutive, elles décident de rester dans leurs acquis et de tenter de réconforter le public dans sa nostalgie. On peut par exemple citer le retour de Hélène et les garçons dans Les Mystères de l’amour, ou bien celui des Bronzés, des Trois Frères ou des Visiteurs dans les salles de cinéma. Bien entendu, la fiction télévisuelle française s’est modernisée et a su proposer de nouveaux regards, de nouvelles aventures, de nouvelles histoires à raconter pour tout type de public, mais la probabilité de voir des mythes de la fiction remodelés est proche de zéro. C’est alors qu’arrivent George Kay, François Uzan et Louis Leterrier, avec l’espoir de voir ce phénomène changer.

À eux trois, ils vont se réapproprier un personnage légendaire pour beaucoup de français-e-s : Arsène Lupin. Le célèbre gentleman cambrioleur adapté maintes et maintes fois au cinéma, qu’il soit français ou japonais (et même animé), va devenir pour ces trois auteurs une figure de fond. Comme son titre l’indique, on avance dans l’ombre d’Arsène. La série raconte l’histoire de Assane Diop, incarné par un Omar Sy qui porte définitivement l’intrigue par la force son sourire espiègle; un orphelin fan d’Arsène Lupin qui souhaite venger la mort de son père, accusé à tort d’un crime par la richissime famille pour qui il travaillait. La première étape de cette vengeance ? Le dérobement d’un collier de diamants ayant appartenu à la reine Marie-Antoinette. C’est ce qui nous est montré dans le premier épisode. Une introduction à l’histoire punchy, divertissante et qui impose une lecture sociale au mythe d’Arsène Lupin. Celui-ci réapproprié par un enfant pauvre victime de racisme qui décide de dérober aux plus riches pour faire justice. Un pitch de départ excitant qui nous promet une série haletante et surprenante pour le grand public. Du moins, c’est ce que l’on pensait…

On excuse rapidement les défauts de ce premier épisode : ses retournements de situations racontés tout en surface en raison d’aller-retours et de flashbacks rendant le tout si évident, ne laissant pas l’intelligence du spectateur ou de la spectatrice intervenir. On excuse car, après tout, on sent une envie de faire de la vraie fiction populaire, moderne et divertissante. Et ce ton si distrayant se maintient tout au long des cinq épisodes constituant la première partie de cette saison. Les péripéties s’enchaînent, quitte à devenir une autre fiction à chaque épisode. Assane joue à Prison Break, Assane joue à Prisoners puis aux Hommes du Président. Il y en a pour tous les genres et pour tous les goûts mais, par conséquent, cela crée ce léger sentiment de s’être trompé sur la marchandise. On a l’impression que la série, ce divertissement, derrière son panache, tente de cacher le fait de ne pas assumer le programme promis : à savoir un feuilleton politique et accessible au grand public. On oublie très vite la dimension politique de Lupin, celle-ci reléguée en arrière-plan pour reprendre des poncifs de la fiction française. Le journalisme d’investigation, la corruption au sein de la police, la dimension sociale… tout ceci est rendu lisse comme pour ne pas trop brusquer le public. En cela, Lupin perd de la désinvolture dont il pouvait faire preuve. Et l’on se retrouve d’autant plus déçu-e-s tant il y avait des preuves de bonne volonté dès le début. La série se suit sans déplaisir, le rythme ne laisse aucun temps mort et le casting aide à maintenir notre attention (on pense à Omar Sy mais aussi à Clotilde Hesme, Soufiane Gherab ou Nicole Garcia), mais qu’est-il arrivé pour voir toutes ces promesses s’envoler en éclats ? 

On ne peut qu’espérer que la seconde partie de cette saison saura nous surprendre, avec une touche de discours social plus incisif. En attendant vous pouvez tout de même regardez la première car, si elle présente ses imperfections d’emblée, elle ne pose pas de Lupin au divertissement, avant tout…

Lupin : dans l’ombre d’Arsène. De George Kay, Louis Leterrier et François Uzan. Avec Omar Sy, Ludivine Saigner, Soufina Gherab et Nicole Garcia. Six épisodes de 45-50 minutes. Disponible sur Netflix

Author

Victor Van De Kadsye

Victor Van De Kadsye

Créateur du site. Je ne vis que pour des artistes comme Michael Mann, Clint Eastwood, Hou Hsiao-hsien ou bien Kelly Reichardt. Capable de réciter n'importe quel réplique de l'âge d'or des "Simpson".

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